RTFM : La mort à petit feu du manuel

Si le sigle « RTFM » ne vous dit rien, c’est que vous êtes déjà probablement passés dans la nouvelle ère de l’informatique moderne. Pour les autres, ce bon vieux « Read The Fuckin’ […]

Si le sigle « RTFM » ne vous dit rien, c’est que vous êtes déjà probablement passés dans la nouvelle ère de l’informatique moderne. Pour les autres, ce bon vieux « Read The Fuckin’ Manual » (Lis le foutu manuel) est un classique parmi les classiques… Et pourtant, malgré l’importance évidente des manuels d’utilisations, ces derniers sont voués à disparaître petit à petit.

Plus ça va et plus les logiciels évoluent vers une certaines forme de simplicité, ou plutôt d’apparente simplicité, qui permet aux utilisateurs de pouvoir les manipuler sans devoir apprendre énormément. Si on ajoute à cela le fait que les gens sont maintenant bien plus habitués aux interfaces informatiques qu’il y a quelques années, il devient inutile de leur expliquer ce dont tout ceci consiste.

Pour les plus anciens, difficile d’avoir oublié les nombreux pavés en papier qui accompagnaient les ordinateurs de l’époque. Comme par exemple sur cette photo du tout premier Macintosh de 1984 accompagné de pas moins de 3 manuels :

Ou encore ce brave Amiga 500 qui était accompagné lui aussi de 3 volumes :

Les exemples ne manquent pas, et toutes les machines ou OS de l’époque ont été accompagnés d’un ou plusieurs « pavés » explicatifs de plusieurs centaines de pages… MS-DOS, Windows, Mac OS ou autres, aucun n’échappait à cette règle. La pratique se retrouvait aussi dans de très nombreux logiciels, Microsoft Office, Deluxe Paint, Photoshop et bien d’autres ont également été livrés avec d’imposants livres explicatifs. Transformant vite l’univers des geek de l’époque en une bibliothèque un peu ardue à lire qui n’aidait pas à donner une image flatteuse de la pratique de l’informatique.

Quand on voit désormais le contenu des boites des dernières versions des systèmes d’exploitations modernes, que cela soit Windows 7 et ses deux petits feuillets, ou Mac OS X livré avec un maigre petit document de quelques pages (voire plus rien en version téléchargée), on remarque vite qu’il s’est opéré un changement radical en assez peu d’années finalement. Mais que cache cette disparition ? Les logiciels sont-ils réellement bien plus simples à utiliser qu’à l’époque ?

En premier lieu, il faut tout de même rappeler que de plus en plus d’applications sont fournies avec une documentation sous la forme d’un document numérique, généralement au format PDF, qui permet d’y accéder sans avoir à posséder un pavé papier.

Mais cela n’explique pas tout, et il y a selon moi deux grandes raisons à cette disparition finalement assez logique :

1) Comme je l’évoquais rapidement en haut de l’article, les gens ne découvrent plus vraiment l’informatique en 2012, sauf à de rares exceptions. Il n’est clairement plus nécessaire d’expliquer aux gens ce qu’est une fenêtre, un fichier, un logiciel et j’en passe. L’outil informatique est rentré dans les meurs et n’est plus l’apanage d’une élite mais réellement un outil du peuple. Que l’utilisateur soit sous Windows (XP, Vista, 7), Mac OS X ou encore une des distribution Linux populaire tel que Ubuntu, les éléments se retrouvent finalement rapidement et sont plus ou moins présentés de la même manière. Pire, la barre des tâche de Windows se transforme peu à peu en dock proche de celui de Mac OS X, tout comme la nouvelle interface décriée de Ubuntu appelée Unity, aidant d’autant la facilité d’usage d’un système à l’autre.

2) Mais au delà même de l’uniformisation des systèmes, c’est l’arrivée des « apps » et des systèmes d’exploitations mobiles tel qu’iOS ou Android qui ont largement changé la donne. En effet impossible de fournir une documentation riche pour une application téléchargée rapidement et qui doit être utilisée tout aussi vite. D’autant plus que l’interface 100% tactile limite énormément les possibilités de documentations. Ces applications ont rapidement utilisées un code toutes assez similaire, ainsi sauf à de rares exceptions, les éléments d’interfaces sont là aussi toujours positionnés aux mêmes endroits avec les mêmes codes visuels. Si on ajoute à cela une simplification à l’extrême de leurs capacités et interface. Un éditeur vidéo digne de ce nom sur ordinateur est une application avec une interface riche qui offre énormément de réglages plus ou moins complexes, les équivalents mobiles sont ici largement simplifiés, avec beaucoup moins de possibilités mais un usage extrêmement facilité qui finalement permet à l’utilisateur final d’avoir très rapidement un résultat convenable alors qu’il lui aurai fallu un petit moment d’apprentissage sur un logiciel plus classique.

Evidemment, tout ceci ne s’applique pas aux logiciels destinés à un public averti. Les professionnels du montage vidéo par exemple utilisent toujours des logiciels très complexes qui permettent énormément plus de choses que la version grand public. Un Photoshop sera toujours plus dur à utiliser qu’un Instagram ! Sans même évoquer les développeurs pour qui la documentation est cruciale et sans laquelle ils ne peuvent quasiment rien faire !

Car l’avenir sera peut être là, une fracture sociale entre ceux qui utilisent l’informatique pensée par d’autres. Fracture qui a toujours existé mais qui s’accroît d’autant plus que les développeurs simplifient leurs créations pour les utilisateurs. Si il semble évident que des outils comme les tablettes numériques deviendront le moyen principal d’utiliser l’informatique, ces appareils limitent d’autant les possibilités d’évolutions et le passage à la véritable informatique (si je puis dire) en sera d’autant plus difficile ! J’espère toutefois que cette fracture aussi forte n’existera jamais mais tout semble pourtant prendre cette voie…

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